Aujourd’hui, était un de ces matins pénibles où une couverte et un bon film semblaient être les seules choses pouvant me rendre heureuse. Mais non, à la place, j’ai dû observer la psychologie humaine. C’était pour mon cours de « métro ». Pendant plusieurs mois je devais rester dans un wagon et observer l’activité humaine. Or, je suis embarquée dans un de ses vieux trains sales qui tous les matins faisait le même trajet. Je me suis assise sur un banc simple et j’ai observé. À 8 heures 32 minutes et 43 secondes une vielle femme embarqua, s’est assise et a lu le journal. J’ai eu quelques doutes sur sa santé mentale puisqu’elle était aveugle et elle lisait. Elle semblait perdue. Cheveux ébouriffés, ridée comme un raisin sec, ses ongles devaient avoir beaucoup de vécus pour être aussi sales. Elle était vêtue de guenilles cousues ensemble. Chaque partie de son corps avait des rôles très spécifiques. Ses orteils lui servaient de guide pour se retrouver, ses deux gros seins attiraient le regard des hommes contrairement à son cou de poule qui les éloignaient. Ce spécimen étrange me donnait l’impression que chaque homme près d’elle devait subir une analyse complète. Je suis certaine que Dieu en échange de la vue lui avait fourni un micro-ordinateur qui pouvait calculer le nombre de cheveux, de poils de jambes, la taille de pantalon etc. J’ai pu remarquer que ceux qui ébranlaient le plus sa personne était les hommes vêtus d’un manteau rouge et chaussés de souliers aux semelles de caoutchouc. Pourtant, la plupart de ces hommes étaient de vieux grincheux, des rats de bibliothèque ou même de temps en temps des petits caniches bien gâtés par leur maître. Pendant plus de 3000 heures 36 minutes et 22 secondes je suis restée assise dans le métro et j’ai vu cette femme, cette âme seule qui s’adonnait à faire la même routine tous les matins. Je la surnommais désormais « scanner 2007 ». Le 30 juillet 2007, un homme portant un manteau de couleur magenta et des semelles de caoutchouc est embarqué dans ce même wagon. Il semblait tout particulièrement l’intéresser. Comme à chaque fois, le prototype reprenait son analyse : 36 000 cheveux, 8 900 poils de jambes 230 livres et 38 de taille soupçonnais-je. C’était lui, qui, je ne le savais pas mais elle l’avait enfin trouvé. D’un coup son visage s’est illuminé, tellement, qu’il me fit un teint basané. Suite à plusieurs manigances subtiles elle a réussi à se faire raccompagner chez elle par cet homme tout à fait inconnu à mes yeux mais totalement compris par les siens. Suite à cette expérience je ne suis jamais revenue à l’école pour ainsi réfléchir à ce moment étrange de ma vie. J’ai compris que cet homme était son ex-mari. Étant muette et aveugle elle ne pu jamais lui avouer qui elle était réellement mais être à ses côtés et espérer de l’être la satisfaisait. Sans le vouloir ce garçon voulait la retrouver puisqu’il savait que la seule couleur que sa femme pouvait distinguer était le rouge et que le seul matériel qu’elle était capable de différencier était le caoutchouc. Jamais cette femme allait pouvoir revivre avec son mari mais le simple fait d’espérer de le revoir la maintenait en vie.